Mariangel Vargas, exilée, prodige des échecs

À 12 ans, Mariangel Vargas rêve de devenir « Grand maître international » du jeu d’échecs. Cette Colombienne, qui a fui son pays avec sa famille, a déjà remporté quelques tournois, elle qui ne connaissait rien aux échecs il y a tout juste un an, à son arrivée à New York. Certains voient en elle un prodige. Peut-être le début d’une carrière à succès.

Temps de lecture estimé : 4 minutes

Mariangel Vargas lors d’un tournoi d’échecs à New York. © Archives personnelles de Jamaal Dozier.

Mariangel Vargas lors d’un tournoi d’échecs à New York. © Archives personnelles de Jamaal Dozier.

Devant l’échiquier, Mariangel Vargas a le visage fermé, elle fronce les sourcils, touche l’épais cadre noir de ses lunettes, puis un demi-sourire aux lèvres, elle passe à l’action… « Échec ! », prévient-elle. En face, Russ Makofsky doit mettre son roi noir à l’abri. Un mauvais coup joué quelques minutes auparavant pourrait lui coûter la partie. « Normalement, je gagne », dit-il. « Mais si je ne suis pas concentré, elle ne me rate jamais ! Elle devient de plus en plus redoutable, ou peut-être est-ce moi qui suis de moins en moins bon ! », ajoute-t-il dans un grand rire.

Russ Makofsky et Mariangel Vargas se sont rencontrés il y a un an lorsque le New-Yorkais a mis en place des ateliers d’échecs bilingues anglais-espagnol à destination des enfants migrants arrivés avec leurs familles dans la ville.

Grâce à sa fondation The Gift of Chess (« Le don des échecs »), il a pu très vite proposer des cours dans les écoles publiques qui recevaient ces nouveaux élèves dont la grande majorité ne parlait pas anglais et n’avait jamais vu d’échiquier.

La naissance d’une passion

« Je me souviens que j’étais très nerveuse au début », se rappelle Mariangel Vargas. « Je ne connaissais rien aux règles des échecs. » Très vite, la fillette, alors âgée de 11 ans, se découvre une passion pour le jeu et passe des heures à s’entraîner. Et au fur et à mesure qu’elle progresse, sa maîtrise de l’anglais s’améliore et ses résultats à l’école avec, à la grande joie de ses parents.

« Au début, je pensais que les échecs, c’était comme jouer aux cartes », dit en souriant Alexandra Gomez, la maman de Mariangel, avant d’ajouter qu’elle s’était rendu compte que cela apprenait à sa fille « la concentration, la stratégie et la patience », « des qualités qui vont lui servir pour réussir ».

« Les échecs sont devenus très importants pour elle », confie à son tour Francisco Vargas, le père de Mariangel, qui cumule les défaites sur l’échiquier face à sa fille. Il estime que cela a permis à la fillette de « mieux s’adapter à sa nouvelle vie ».

Un parcours difficile

Car les choses ne sont pas toujours faciles au quotidien. Arrivée il y a quatorze mois aux États-Unis, la famille vit encore dans un centre d’hébergement d’urgence.

Francisco et son épouse ont dû fuir la Colombie avec leurs enfants, car ils étaient menacés en raison de leur travail auprès des victimes du conflit armé dans le pays. « Pour ne pas leur faire peur, j’ai dit aux enfants qu’on partait en vacances », raconte Alexandra Gomez.

La famille se rend au Mexique en avion, puis traverse à pied le désert vers les États-Unis. Un voyage éprouvant. « Mariangel pleurait sans cesse », se rappelle la maman. À leur arrivée à New York, la petite fille « ne veut rien faire, ni manger, ni aller à l’école, ni sortir ». Ses parents s’inquiètent : « Je disais à mon mari que notre petite fille allait tomber en dépression. ». Tout a changé lorsque Mariangel a découvert les échecs.

La révélation

En quelques mois, la petite fille progresse à une vitesse phénoménale. Russ Makofsky l’inscrit à des tournois locaux, puis nationaux lors desquels elle fait sensation. « J’arrive à anticiper les coups dans ma tête, sans toucher les pièces », explique Mariangel. Sourire malicieux et le regard plein d’étoiles, elle ajoute : « J’aime beaucoup gagner, mais j’ai aussi appris que ce qui compte ce n’est pas de gagner ou de perdre, mais de bien jouer. »

Aujourd’hui, Mariangel possède trois trophées et dix médailles et elle fait partie des cinquante meilleures joueuses de son âge aux États-Unis. Pour Russ Makofsky, qui a initié des milliers d’enfants aux échecs, « il ne fait aucun doute qu’elle a quelque chose de spécial » et « qu’elle est promise à un bel avenir ».

L’article complet sur RFI

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *