Champion d’échecs : une question d’intelligence, pas que d’entraînement

L’ENTRAINEMENT EST-IL SUFFISANT POUR DEVENIR UN BON JOUEUR D’ÉCHECS ? ARTICLE DE JEAN-LUC GOUDET POUR FUTURA-SCIENCES

A gauche, Zach Hambrick, professeur de psychologie de l'Université du Michigan, et Alexander Burgoyne, son étudiant diplômé discutent de la corrélation entre le niveau aux échecs et l'intelligence - Photo © G.L. Kohuth

A gauche, Zach Hambrick, professeur de psychologie de l’Université du Michigan, et Alexander Burgoyne, son étudiant diplômé, discutent de la corrélation entre le niveau aux échecs et l’intelligence – Photo © G.L. Kohuth

Non, affirment des chercheurs venus de trois pays qui ont réalisé une méta-analyse englobant 1.800 personnes. Les bons résultats à ce jeu sont corrélés à de bonnes performances dans des tests cognitifs, constatent-ils.

L’expérience des 3 sœurs Polgar

La question de la relation entre intelligence et talent au jeu d’échecs est posée depuis longtemps. Le Hongrois László Polgár s’est imposé dans le débat d’une manière originale. Ce théoricien des échecs a éduqué ses trois filles, nées à la fin des années 1970, avec un entraînement intensif, entendant démontrer ainsi que le génie n’est pas inné, à ce jeu comme ailleurs. De fait, Susan, Judit et Sofia sont toutes trois devenues championnes. Judit Polgár, qui a quitté la compétition en 2014, est même considérée comme la meilleure joueuse de tous les temps.

L’étude de l’Université du Michigan

La conclusion du travail d’Alexander Burgoyne, de l’université du Michigan, et de ses collègues (dont un Australien et un Britannique), est inverse. Dans un article publié dans la revue Intelligence, ils montrent une corrélation élevée entre les réussites à des tests d’intelligence et le classement aux échecs.

Les chercheurs ont réalisé une « méta-analyse ». Ils ont donc passé en revue des études déjà effectuée sur cette question, en l’occurrence 19, concernant 1.800 personnes. Selon eux, le classement Elo aux échecs est significativement corrélé à, en particulier, la mémoire à court terme, la rapidité de raisonnement, « l’intelligence fluide » et « l’intelligence cristallisée ».

Elles sont en revanche moins bien liées à l’habilité verbale, visuelle ou numérique. Les corrélations, de plus, sont meilleures avec les jeunes joueurs et ceux de niveaux faibles, ce qui s’expliquerait par le simple fait que les meilleurs compétiteurs constituent une population déjà sélectionnée. Dans le communiqué de l’université du Michigan, les auteurs expliquent que le résultat serait le même pour la taille des joueurs de basket-ball : chez les professionnels, elle influe peu sur les performances car ils sont tous grands.

Corrélation ne signifiant pas relation de cause à effet, on peut se demander si la pratique du jeu d’échecs pourrait développer l’intelligence. Par ailleurs, les mesures quantitatives d’intelligence n’étant pas d’une fiabilité irréprochable, on pourrait émettre des réserves sur les conclusions. Mais le travail a le mérite de montrer pour la première fois qu’un bon joueur d’échecs réussit bien les tests d’intelligence.

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