Dans le camp de réfugiés de Kanyaruchinya, situé en périphérie de Goma, les enfants trouvent un répit inattendu dans le jeu d’échecs.
Des enfants jouent une partie d’échecs au « Club d’échecs de Soga » du camp de personnes déplacées à Kanyaruchinya, le 29 juillet 2024 – Video © Moses Sawasawa / Africanews
Alors que des milliers de familles ont fui la violence persistante dans l’est de la République Démocratique du Congo, le club d’échecs Soga offre une échappatoire précieuse aux jeunes dont les vies ont été bouleversées par des décennies de conflit.
Le camp de Kanyaruchinya, comme beaucoup d’autres dans la région, est caractérisé par des conditions de vie précaires et un manque de soutien émotionnel et éducatif. Pourtant, grâce à l’initiative de Soga, les enfants comme Pendeza Muzo, 13 ans, trouvent un soulagement temporaire des horreurs qu’ils ont vécues.
Pendeza Muzo, originaire de Kibumba, une ville ravagée par les combats entre les rebelles du M23 et les forces gouvernementales congolaises, témoigne :
« Les bombes tombaient partout et passaient juste au-dessus de nos têtes. Mais depuis que ces personnes sont venues au camp pour nous apprendre les échecs, j’ai oublié les bombes. Parfois, nous oublions même nos proches décédés lorsque ces gens viennent nous enseigner les échecs. Quand nous jouons à ce jeu, nous pouvons nous concentrer sans trop de pensées en tête. »
Arusi Niozima, également âgée de 13 ans, exprime que le jeu l’a aidée à tisser des liens avec les autres enfants du camp. « Depuis que nous avons commencé à jouer aux échecs, cela nous a permis de nous faire des amis. Cela nous apporte de la joie. Quand nous jouons, nous sommes de bonne humeur, parce que nous sommes ici avec nos amis, » raconte-t-elle. Arusi vit avec sa mère dans des conditions rudimentaires, où elles préparent leurs repas à l’extérieur après avoir coupé du bois.
Pour les parents comme Feza Ntwambaze, la mère d’Arusi, le club d’échecs représente un espoir pour une enfance plus joyeuse pour leurs enfants. « Depuis que mes enfants apprennent à jouer aux échecs, je suis très heureuse. Les enfants dans les camps passent leur temps à ne rien faire. Ils sont là, tristes, chaque jour, mais depuis que ce jeu est arrivé, je vois que les enfants sont tellement heureux et je suis très heureuse. »
Akili Bashige Lwenda a créé un club d’échecs
Akili Bashige Lwenda témoigne des difficiles conditions subies par la population congolaise – Photo © Moses Sawasawa / Africanews
Le club d’échecs, fondé par Akili Bashige Lwenda, enseigne aux enfants des compétences en pensée critique et en résolution de problèmes. Malgré les conditions difficiles, sans tables pour les échiquiers et avec des jeux posés directement sur le sol, Lwenda reste optimiste. « Ce sont les enfants les plus oubliés de la planète. Nous croyons en leur intelligence et en leur capacité intellectuelle. Le fait qu’ils soient ici dans le camp n’exclut pas leur intelligence, ni leur place dans le monde intellectuel. Nous voulons qu’ils se battent pour la paix pour nous dans le futur. »
Le conflit prolongé dans l’est du Congo a engendré l’une des pires crises humanitaires au monde, avec plus de 100 groupes armés se battant pour le contrôle des terres et des mines de minéraux précieux. La violence a déplacé environ sept millions de personnes, dont des milliers vivent dans des camps temporaires comme celui de Kanyaruchinya.
Akili Bashige Lwenda croit fermement que les jeunes générations pourraient apporter la paix, à condition de recevoir le soutien adéquat. « Ça fait trois décennies que notre pays traverse un cycle de violence. Nous nous sommes dit que pour briser ce cycle, nous devons prendre soin des enfants. Les enfants sont l’espoir de demain. Donc, pour œuvrer vers une paix durable, les enfants doivent être éduqués. Ils doivent savoir comment se gérer, et ils doivent comprendre que chaque problème dans la vie ne peut pas être résolu par la violence, mais par l’intelligence, par la réflexion. »
À Kanyaruchinya, les échecs ne sont pas seulement un jeu, mais un symbole d’espoir et de résilience dans un contexte de crise continue.
L’article sur AfricaNews