Ils ont mis leur vie en jeu(x) et les échecs les ont sortis du désespoir, de l’exclusion et même de la rue. Les destins de Fahim et Mohamed, par Valérie Borst 🎧 Les Podcasts
Créteil (Val-de-Marne), le 6 septembre 2019. A 19 ans, Fahim Mohammad est aujourd’hui étudiant en prépa aux grandes écoles de commerce. Le film tiré de son histoire, « Fahim », est sorti le 16 octobre 2019 – Photo Le Parisien /Aurélie Ladet
Mohamed a découvert les échecs par hasard et s’y est accroché par désespoir, pour combattre et maîtriser son autisme. Fahim, lui, y joue depuis toujours par plaisir ou par ennui. Jusqu’au jour où le jeu lui a changé la vie.
Un jeu libérateur
Pour les deux jeunes hommes, les échecs ont eu un rôle ambivalent. Fahim Mohammad, fils d’un dissident politique bangladais, superforme aux échecs alors qu’il n’a que huit ans. Il participe même à des compétitions d’échecs en dehors des frontières du Bangladesh. Il se rendra notamment en Inde. Avec du recul, il indique : « c’est là que l’insécurité a commencé, parce qu’on a reçu des menaces, par jalousie, parce que mon père était un opposant politique, ce qui a fait que j’étais une cible. »
Finalement, après de nombreuses pérégrinations, il parvient à s’établir en France, avec sa famille. Alors que la famille Mohammad se voit refuser l’accès à la nationalité française, Fahim s’efforce de poursuivre sa passion pour le jeu de stratégie. En un sens, l’échiquier le sauvera. Il conclut : « Les échecs, c’est compliqué parce que c’est ce qui m’a poussé à fuir le Bangladesh. Mais c’est aussi ce qui m’a sauvé, clairement. Ils ont joué les deux rôles. C’est un peu comme si les choses s’étaient rééquilibrées, finalement. Ça avait mal commencé et puis, les échecs m’ont rendu ce qu’ils me devaient. »
Mohamed Iberraken est autiste. Sa mère, Malika Iberraken le décrit comme « fermé au monde« .
Pour « l’ouvrir » des professionnels de la santé conseillent à la mère de famille de faire découvrir un maximum d’activités au jeune Mohamed. Il a donc joué de la musique, mais également pratiqué divers sports comme l’athlétisme ou le jujitsu. C’est alors qu’il est initié aux échecs. Lui qui était « agité« , « qui serrait les mains, sautait » a radicalement changé.
Mohamed explique qu’au départ, il n’appréciait pas les échecs car « je perdais toutes mes parties ». Pourtant, il s’est vu transformé par le jeu de stratégie. Malika, la mère de Mohamed rapporte : « Plus on avançait dans le temps et plus je voyais que Mohamed s’asseyait, restait pratiquement deux heures assis. C’est là que j’ai vu qu’il y avait quelque chose qui changeait chez Mohamed. Le fait qu’il s’assoie devant un échiquier à réfléchir, qu’il se concentre, qu’il ne bouge pas. Je l’ai remarqué tout de suite. J’étais super heureuse. Les échecs lui ont permis de se canaliser. » C’est le jeu de société qui lui a permis de se révéler. La mère de Mohamed finit d’expliquer : « ce jeu d’échecs a permis à Mohamed de s’ouvrir, de s’ouvrir aux autres, de s’ouvrir au monde. »
- Reportage : Valérie Borst
- Réalisation : Vincent Abouchar
Merci à Mohamed et Malika Iberraken, Fahim Mohammad, la FFE (Fédération Française des Échecs) et Antonin Violette ainsi qu’à Pierre Plantin.
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