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Le magazine l’équipe Explore vient de publier un superbe papier intitulé Kasparov contre le reste du monde.
C’est l’histoire d’un génie des échecs né en 1963 d’un père juif Kim Moïssevitch Weinstein et d’une mère d’origine arménienne Clara Kasparova. Devenu le 13e champion du monde à l’âge de 22 ans, il aura marqué de son talent le jeu d’échecs avant de se lancer en 2005 en politique à l’assaut de Poutine.
Le maudit Français qui bat Garry Kasparov
Dans les années 90, le champion d’échecs Français Joël Lautier l’aura affronté 10 fois en cadence classique avec un score final positif (+2, =7, -1). Joël Lautier n’a pas l’outrecuidance de penser qu’il avait trouvé la recette pour battre Kasparov, mais les statistiques officielles sont formelles : il est l’un des rares à afficher un score positif contre le Russe dans les parties classiques. Sur dix parties disputées, il a en effet gagné deux fois pour une défaite et sept nulles. « Être positif contre Kasparov, c’est une fierté extraordinaire puisque c’est le champion mythique avec peut-être Fischer et Karpov. Je suis bien conscient que c’est quelque part une anomalie parce que Kasparov était plus fort que moi, mais néanmoins il y a des circonstances dans le sport où un joueur est incommode pour un autre.
Joel Lautier bat Garry Kasparov à Linares 1994 par Chess-and-Strategy
Rejouer la fameuse partie d’échecs entre Garry Kasparov et Joël Lautier, une première victoire du Français à Linares 1994.
Retour sur l’histoire de Garry Kasparov
Dans l’univers étrange, fascinant et pour tout dire suranné du jeu d’échecs, Garry Kasparov est toujours l’astre le plus brillant. Il y a dix ans, à la surprise générale et alors qu’il était toujours le numéro 1 incontesté, il mettait un terme à sa carrière professionnelle. Pourtant, l’ancien champion du monde de ce sport cérébral aux possibilités infinies en demeure l’incarnation et continue d’aimanter l’intérêt médiatique. Bien plus que le génial Norvégien Magnus Carlsen, l’actuel champion du monde, dont la notoriété peine à dépasser le cercle des amateurs du noble jeu, en dépit de sa jeunesse (24 ans) et de sa modernité. Par son incroyable talent et son charisme, Garry Kasparov avait fait exploser cette frontière invisible qui sépare les échecs du monde réel, en déboulant dans les années 1970, avant de devenir la figure majeure incontestable du jeu au cœur des années 1980 et d’étendre son règne jusqu’au début du XXIe siècle.
Les échecs, un véritable culte en Union soviétique
Roi du sport roi en URSS, le champion né en 1963 à Bakou (Azerbaïdjan) a profité des circonstances historiques et géopolitiques de l’époque. Rebelle dans l’âme, il est devenu un symbole du changement en accompagnant les bouleversements qui ont conduit à l’effondrement de l’Union soviétique. L’histoire des échecs des 40 dernières années a en effet été intimement liée à la marche du monde, entre guerre froide et perestroïka, système soviétique en bout de course et renouveau russe.
Garry Kasparov a joué un rôle certes symbolique, mais il a imprimé les mémoires en Occident. Dans un décor politique en mutation, il a su déployer toute son envergure, comme prodige du jeu d’abord, puis comme empêcheur de tourner en rond, avant d’en faire finalement un tremplin vers d’autres ambitions, d’autres combats. Aujourd’hui, si c’est toujours en qualité « d’ancien champion du monde » qu’il s’exprime dans ses écrits et dans les médias, le roi qu’il entend faire tomber n’est plus une pièce de bois haute de quelques centimètres mais bien Vladimir Poutine, le président russe dont, depuis des années, il dénonce avec un acharnement méthodique les dérives autocratiques. Ce combat, bien plus incertain que les joutes échiquéennes, occupe désormais l’essentiel de son existence. « J’ai toujours attaqué parce que c’était la seule chose que je savais faire. Maintenant, j’attaque parce que je sais que c’est ce qui marche le mieux », répond-il à ses contempteurs qui le décrivent obsessionnel. Ces prochains jours, sortira Winter is coming, son nouveau livre, entièrement consacré à la lutte qu’il mène contre Vladimir Poutine. Avec son titre, référence à la série à succès Game of thrones, ce bouquin scelle, s’il en était besoin, l’incroyable destin de l’ancien pousseur de bois qui, dès le plus jeune âge, a fait de sa vie un combat. Personnage « bigger than life », Garry Kasparov méritait bien qu’on parte à sa rencontre pour tenter de comprendre ce qui le motive à endosser aujourd’hui ce costume de Don Quichotte face à un des hommes les plus puissants de la planète.
Son duel mythique face à Anatoly Karpov aura marqué l’histoire du jeu d’échecs
Tâche ardue que de coincer le bonhomme. Entre les conférences grassement rémunérées dont il a fait son business et qu’il dispense un peu partout à travers le monde, les plateaux télé des chaînes d’info américaines où il est omniprésent dès qu’il s’agit d’aborder la question russe, en passant par ses interventions régulières dans le Wall Street Journal, et une présence assidue sur les réseaux sociaux où il distille ses saillies et commentaires sur l’actualité, Garry Kasparov est insaisissable. À raison de 90 vols par an, soit un tous les quatre jours en moyenne, difficile en effet de savoir sous quelle latitude il se trouve, à quel fuseau horaire il obéit. Ses meilleurs amis ont d’ailleurs renoncé à lui téléphoner, de peur de le réveiller au milieu de sa nuit. Mais les plus fidèles savent qu’il ne les oubliera pas le jour de leur anniversaire. C’est déjà ça.
Kasparov par Chess-and-Strategy
Maître du jeu il était, maître du jeu il reste. C’est toujours lui qui décide du jour, de l’heure et de l’endroit. Qui dicte le tempo.
Pour en savoir plus : L’article complet de l’Equipe Explore